Un départ retardé. [Libre]

Le jour se levait une fois de plus sur ce magnifique paysage. Les ombres reculaient lentement du sommet des montagnes sacrées pour venir mourir à leurs bases. La brise soufflait légèrement en émettant une douce mélodie lorsqu’elle venait s’engouffrer dans les gorges. Ces montagnes accueillaient en leur sein plusieurs forêts où poussaient des arbres diverses qui permettaient à la faune vivant ici de subvenir largement à leurs besoins. Un fleuve traversé de part en part ces montagnes et l’eau était d’une clarté sans pareil. Sur ce fleuve était amarré le Yǒnghéng depuis une quinzaine de jours. La coque semblait endommagée, en effet par-ci par là plusieurs trous la parsemé. Le bateau avait dû traverser un océan déchainé pour arriver jusqu’ici, et malheureusement il ne pouvait pas encore repartir.

Une porte s’ouvrit brusquement sur le pont et un jeune marin sortit rapidement en courant vers la proue. Le sol venait à peine d’être frotté et lavé et le marin dû faire appel à son sens de l’équilibre pour rester debout. Une fois arrivé à l’avant du bateau et fier de ne pas être tombé, le marin héla son capitaine d’une voix forte.
Gan Ning s’était levé tôt, comme à son habitude, pour pouvoir s’entraîner en profitant de la légère brise du matin. Il faisait alors ses exercices pendant plus de deux heures, puis il allait se promener dans les forêts environnantes avant de rejoindre son équipage qui s'affairait à réparer la coque.

« Hey, Cap’tain ! Vous allez bien de si bon matin ? J’espère ne pas trop vous déranger pendant votre entraînement mais… y’a vraiment un gros problème là. »

Ning cessa son Tao, s’épousseta rapidement puis se dirigea vers le marin d’un pas rapide avec un grand sourire. Il semblait glisser sur l’herbe haute tellement ses pas étaient légers.

« Tu ne me dérange pas marin. Que se passe-t-il pour courir si rapidement au risque de te casser une jambe ? » lança Ning d’un ton rieur.

Le marin semblait gêné devant cette remarque puis se reprit rapidement et répondit toujours d’une voix forte :

« Et bien, c’est que y’a presque plus rien à manger Cap’tain, si l’équipage ne peux plus se nourrir, les réparations prendront du retard et nous ne pouvons pas rester plus d’une semaine amarré ici. Il va bien falloir rejoindre la civilisation. »

Ning fut pris d’un fou rire devant cette remarque qu’il n’attendait pas. Il s’élança vers la coque et grimpa sur le bateau avec aisance afin de se retrouver à côté de son compagnon.

« La nourriture ne manque pas ici, marin. Ouvre tes yeux et écoute ce qui t’entoure. La nature nous parle, et il y a de quoi manger pendant des années près de ces montagnes. Amène tes compagnons faire un tour dans les bois, vous m’en direz des nouvelles ! »

La marin acquiesça puis s’engouffra par la porte d’où il était arrivé. Il était 11h, la journée promettait d’être belle. Le soleil était de mise depuis ces deux semaines passées ici, les pluies ne tombaient que la nuit. Un vrai paradis. Gan Ning se perdit dans ses pensées alors qu’il contemplait les sommets des ces montagnes sacrées.

*Le temps est long tout de même… La coque est bientôt réparée, nous allons pouvoir repartir si aucun contre temps ne vient immiscer. Il n’y a vraiment personne ici, à croire que c’est un lieu abandonné. Un peu de visite aurait été la bienvenue.*

Ning soupira doucement puis s’éclipsa par la porte qui menait à sa cabine.

Le jour était bien avancé et la chaleur se faisait de plus en plus ressentir. Le bateau devenait pratiquement une fournaise due à la réverbération des rayons du soleil sur l’eau claire et les marins s'afféraient toujours à réparer la coque endommagée. Gan Ning participait également à la tâche - bien que ses hommes ne le voulaient pas – pressé de reprendre la mer et de rejoindre la ville la plus proche pour réapprovisionner son navire et son équipage.
Un des hommes s’arrêta soudain, il s’agissait du marin qui s’était entretenu le matin même avec Ning. Sur son visage perlaient plusieurs gouttes de sueur et son haut était trempé, il s’essuya machinalement le front avant de se tourner vers le capitaine.

« Mon Cap’tain, il fait une chaleur à crever, nous ferions mieux d’arrêter les réparations et de reprendre ce soir lorsque l’air sera plus frais. Nous pourrions en profiter pour aller chassez comme vous l’avez suggéré ? »

Gan Ning regarda son compagnon d’un air amusé et acquiesça de la tête avant de s’éclaircir la voix et de s’adresser au reste de l’équipage :

« Mes hommes, vous avez bien travaillé jusqu’ici, mais devant la chaleur qu’il fait aujourd’hui, il serait bon se vaquer à d’autres occupations. Comme vous le savez sûrement, la nourriture va venir à manquer, j’aurai donc besoin d’une dizaine d’homme avec moi pour voir ce qu’on peut trouver dans ces bois. Qui se joint à l’expédition ? »

Ning regardait ses hommes de haut avec l’air sérieux qu’il a l’habitude de prendre lorsqu’il parle à son équipage entier. Certes il était de nature sereine et calme, mais il savait être dur quand il le fallait.
Finalement, toutes les mains se levèrent, ce qui eu pour effet de décrocher à nouveau un sourire à Gan Ning, fier de la fidélité de ses camarades.

Une fois les préparatifs de chasse terminés, la dizaine d’homme et Gan Ning lui-même s’enfonçait maintenant dans la forêt. Les arbres étaient assez éloignés les uns des autres, ce qui rassurait Ning en cas d’attaque, car il n’avait peut être jamais vu personne lors des ses entraînements, mais l’idée que cet endroit paradisiaque soit inhabité ne semblait pas vraisemblable. Le feuillage était si important que les rayons ne pouvaient traverser, cependant la chaleur était tout aussi insupportable dans les bois que sur le bateau, ce qui annonçait déjà que ses hommes ne pourrait pas passer le reste de l’après midi dans la forêt.

*Bon, cela fait déjà plus d’une demi heure que nous marchons, et toujours rien en vu à part quelques volatiles qui ne suffiraient pas à rassasier un dragon. Je vais devoir prendre les choses en mains*

Gan Ning, en tête du groupe, s’arrêta brusquement et posa son regard sur ses compagnons tout en prenant la parole :

« Je vais continuer seul pour le moment, reposez vous un peu puis continuez toujours tout droit, vous finirez bien par me retrouver. A tout à l’heure. »

Ning ne laissa pas le temps à son équipage de répondre ou de protester, il était déjà partit.
Il traversait rapidement la forêt d’un pas léger et assuré et arriva près d’une clairière où quelques cerfs et biches se trouvaient.
Il entendit soudain une sorte de bruissement d’aile semblant provenir des airs puis leva curieusement la tête. Il vit alors une masse énorme se projeter sur les animaux se trouvant dans la clairière, puis observa avec dégoût le spectacle qui s’offrait et l’hémoglobine que s’éparpillait sur le sol et les arbres environnants. Une Dragonne se tenait là, triomphante, et rassasiée.
Mes hommes arrivèrent lorsqu’elle finissait son repas, bien moins silencieusement que Ning. L’être extraordinaire qui se dressait devant eux entendit les craquements des morceaux de bois provoqué pas les chaussures des marins. Le Dragon grogna puis s’envola rapidement en projetant son regard sur le groupe qui était venu le déranger.
Gan Ning demanda à ses compagnons de retourner au bateau, puis se lança à sa poursuite.